Du 19 mars au 27 juillet 2025, la Cinémathèque française accueille une exposition dédiée au réalisateur Wes Anderson. Ce sera l’occasion pour Cinérama de se pencher sur son film le plus emblématique : The Grand Budapest Hotel, ainsi que sur l’une de ses principales inspirations l’œuvre de l’écrivain Stefan Zweig.
Stefan Zweig, né en 1881 à Vienne, dans l’Empire autro-hongrois, et décédé en 1942 à Petrópolis, au Brésil, est un écrivain, dramaturge, journaliste et biographe autrichien. En 1934, fuyant la montée du nazisme et ses origines juives, il quitte son pays natal pour Londres, avant de se réfugier au Brésil, où il mettra fin à ses jours.
The Grand Budapest Hotel raconte l’histoire de M.Gustave (Ralph Fiennes), concierge de l’hôtel Grand Budapest, situé dans le pays imaginaire de Zubrowka, pendant l’entre-deux-guerres. Le film a connu un immense succès critique et public lors de sa sortie en 2014. Il a marqué les esprits grâce à son style visuel unique, rayonnant dans le monde entier, propulsant l’oeuvre de Wes Anderson au-delà des frontières du cinéma.
L’une des sources d’inspiration majeurs du réalisateur est le livre Le Monde d’hier, écrit par Stefan Zweig en 1942, qui évoque la vie en Europe au début du 20e siècle. L’atmosphère nostalgique du film, qui dépeint une Europe disparue à la suite de la montée du fascisme, rouve son origine dans ce livre. Le personnage de Gustave incarne le dernier vestige d’une époque révolue, comme le résume son assistant, Zero : « Son monde s’était évanoui longtemps avant qu’il n’y entre, mais il en avait entretenu l’illusion pendant un petit moment. »
Dans le film, la montée du fascisme et la réduction des libertés individuelles sont symbolisées par les contrôles d’identité aux frontières. Ces scènes font écho au passage suivant : Et de fait, rien ne rend peut-être plus palpable l’énorme régression dans laquelle est entrée l’humanité depuis la Première Guerre mondiale, que les restrictions apportées à la liberté de mouvement des hommes et à leurs libertés. Avant 1914, la Terre appartenait à tous ces habitants. (…) Il n’y avait ni permis, ni visas, ni tracasseries ; ces mêmes frontières qui, avec leurs douaniers, leur police, leurs postes de gendarmerie, sont aujourd’hui transformées en réseau de barbelés en raison de la méfiance pathologique de tous envers tous, n’étaient rien d’autre que des lignes symboliques qu’on traversait avec autant d’insouciance que le méridien de Greenwich. »
Wes Anderson appuie sa référence en ne montrant aucune frontière physique durant les différentes scènes. Le contrôle s’effectue au milieu d’un désert de neige, sans indication claire que l’on passe d’un pays à un autre.
Le réalisateur a également mentionné d’autres livres comme sources d’inspiration, notamment La Pitié dangereuse (pour l’aspect des histoires imbriquées les unes dans les autres) et 24 heures dans la vie d’une femme.
Il est paradoxal de constater que ce sont avant tout des écrits qui ont inspiré le film, alors même que c’est son style visuel qui est aujourd’hui copié et dupliqué par de nombreux créateurs sur les réseaux sociaux. On peut également citer le site Accidentally Wes Anderson, qui regroupe des photos se rapprochant de l’univers visuel du réalisateur, et qui a publié plusieurs livres à succès.
Cependant, c’est bien la vision de l’auteur, couplée à celle du cinéaste, qui apporte la magie particulière à ce film et en constitue la source principale d’inspiration. L’aspect visuel découle de cette vision et non l’inverse. Wes Anderson nous le rappelle en terminant son film avec la phrase suivante : “Inspired by the writtings of STEFAN ZWEIG”