Ce mois-ci, focus sur Pessah, l’une des fêtes les plus fréquemment traitées au cinéma, avec deux approches principales : l’une consiste à explorer la grande histoire, en se focalisant sur la sortie d’Egypte et le personnage de Moïse, tandis que l’autre intègre une scène de Seder dans le film.
L’histoire de Moïse et de la sortie d’Égypte est largement représentée à l’écran. Chaque adaptation reflète les préoccupations et les contextes de son époque, ce qui donne lieu à des versions très diverses, parfois éloignées du texte biblique original.
Les Dix Commandements de Cecil B. DeMille sort en 1956, une période où le cinéma est menacé par l’essor de la télévision. Les longs-métrages doivent être les plus spectaculaires possible pour donner une bonne raison aux spectateurs de se déplacer en salle. Le film sera donc un péplum de plus de 3h30, avec un casting de stars, des décors majestueux et les effets spéciaux les plus novateurs de l’époque.
Moïse y est représenté avec des cheveux longs et une longue barbe pour se rapprocher de l’image qu’on se fait du personnage dans les textes. Cependant, il est interprété par un jeune acteur (Charlton Heston, 33 ans à l’époque), connu pour sa carrure imposante, parfaitement en accord avec les standards de beauté attendus pour une star de son temps.
Dans Exodus : Gods and Kings, le récit biblique se mêle aux codes du film d’action moderne. Moïse, incarné par Christian Bale, prend ici des airs de chef de guerre, arme à la main, prêt à liérer son peuple face à l’oppression égyptienne. De plus, grâce aux progrès techniques, les scènes bibliques sont représentées de manière beaucoup plus impressionnante, apportant ainsi une dimension encore plus épique au film. La scène de la traversée de la mer Rouge en est un exemple frappant. Elle s’apparente à un climax d’un film de grand spectacle, où se mêlent scènes de guerre et catastrophes naturelles
Enfin l’animation a également permis de représenter le récit biblique d’une nouvelle façon. Dans Le Prince d’, Moïse est représenté plus jeune, des chansons sont introduites, ce qui permet de s’adresser à un jeune public de manière plus ludique, sans délaisser le caractère tragique de l’histoire.
Toujours en lien avec Pessah, le Seder est également souvent représenté dans les films. Contrairement à l’histoire de la sortie d’Égypte, il n’est jamais véritablement le sujet principal de l’intrigue. Il figure généralement dans une seule scène, où plusieurs personnages se rassemblent, jouant un rôle à part entière dans le déroulement du scénario.
Le Seder a cependant peu de symboles reconnaissables par le grand public (contrairement aux fêtes de fin d’année, très codifiées sur le plan visuel), ce qui laisse donc plus de place au réalisateur pour choisir l’angle sous lequel il traitera les scènes liées à la pratique de la fête.
Dans Crime et Délit, les personnages se posent des questions durant le Seder, mais pour parler de la responsabilité de celui qui persécute et de savoir s’il sera ou non puni. Cela renvoie le personnage principal à son propre raisonnement sur le crime qu’il a orchestré.
Dans Le Tango des Rashevski, le réalisateur s’intéresse davantage à la place du rite pour les personnes qui y participent. Chacun doit trouver sa place autour de la table et choisir de sauvegarder les traditions qui lui sont chères, à sa manière.
Enfin, dans Uncut Gems, bien que les personnages soient filmés en train de lire la Haggada, la fête n’entre pas en résonance avec ce qui vit Adam Driver : le rituel familial semble être son dernier lien avec ses proches et une parenthèse entre ses problèmes et ses histoires douteuses.
Ainsi, le Seder s’incorpore facilement au scénario et permet de faire avancer le récit ou de le mettre en abîme, en s’appuyant plus ou moins sur la symbolique de la fête. Pessah est donc un formidable terrain de jeu pour les réalisateurs, que ce soit pour filmer son histoire ou la pratique du Seder de nos jours.