Février 2024 Paris. Le festival Diasporama vient de se terminer et des dizaines d’images et de sentiments nous assaillent.
D’abord, on se souvient des rires. Notamment lors de la projection de “Less than Kosher” à la soirée de clôture, alors que depuis le 7 octobre on avait perdu l’habitude… Ce film loufoque, autoproclamé comédie musicale “jewpop” a conquis le public, mais aussi le jury qui lui a accordé le grand prix cette année.
La semaine précédente on avait déjà bien ri avec la projection du Dernier des juifs de Noé Debré, avec une Agnès Jaoui épatante en mère juive et un Michaël Zindel complètement perché. Même si les retours en fin de séance étaient surtout que la tristesse du propos, celle d’un antisémitisme rampant dans les cités françaises, avait été enrobé dans une comédie.
Rires toujours, avec “Paris boutique” qui remporta le prix du public avec son duo d’actrices franco-israéliennes, Josephine Drai et Neli Tagar.
Puis vint l’émotion devant la vie et l’œuvre du Mime Marcel Marceau, résistant qui sauva des enfants juifs pendant la guerre, avant de marquer des générations entières de comédiens, de danseurs et de mimes à travers le monde entier.
La nostalgie face à la perte de vitesse du ladino, venait s’inviter à la projection de The final Hour qui remporta le prix du documentaire.
La tendresse était présente aussi avec IMordecai, qui parle de la vieillesse dans le monde 2.0 et de la maladie d’Alzheimer avec brio et poésie.
L’étonnement également était présent lors de la projection de Shoshana qui raconte entre autres les actions du groupe Stern avant la création de l’Etat d’Israël.
Les débats non plus n’ont pas manqué de piquant lors de cette édition 2024 de Diasporama.
Que ce soit sur l’Allemagne d’aujourd’hui représentée par la jeune réalisatrice de “The forger”, ou l’incompréhension face à la trahison de Marcus Klingberg, espion israélien à la solde de l’URSS.
L’incrédulité également avait sa place, face à Mr Polsky persuadé que son nouveau voisin est Hitler dans “My neighbor Adolf”.
Et la tension aussi, présente chez tous les spectateurs présents pour “El amor en su lugar”. Le film se déroule en 1942 dans le ghetto de Varsovie et chacun en le regardant se demandait : qu’aurais-je fait à leur place ?
Une bonne illustration justement, de ce que représente la magie du cinéma ! Car voir ces films c’est nous transporter dans des temps et des lieux qu’on ne connaît pas, de nous faire aimer des gens qu’on ne touche pas. D’enchaîner des pleurs et des rires. D’admirer ou de détester des acteurs, des personnages ou des films et d’en parler avec les amis pendant des heures. Ca n’a l’air de rien mais même si la réalité dépasse souvent la fiction, cette dernière a une grande influence sur nous. Et nous donne un indicateur sur l’état de l’humanité…
Quand en 2023, Paris, rue Broca, Jo Amar me proposa d’abord de réaliser les entretiens avec les réalisateurs et les acteurs des films sélectionnés à Diasporama, je ne me doutais pas encore que je plongerai à ce point dans le festival jusqu’à en assurer la direction artistique, pour mon plus grand plaisir et j’espère le vôtre.
Et pourtant c’était irrésistible et même logique d’une certaine façon… En 1995 déjà, à Cannes, alors que le festival international du film bat son plein, jeune journaliste je me lève aux aurores pour assister à la première projection, à 8h du matin. Je suis déjà fan de cinéma, et quand Ava Gardner envahit l’écran avec la fameuse scène des gants de “Gilda”, je sais que ce virus du cinéma qui consiste parfois à voir 3 films par jour, ne me quittera plus jamais.
Merci à Diasporama de me permettre de le conserver, toute l’équipe espère bien vous contaminer rapidement avec son enthousiasme. On vous laisse, on a déjà 60 films à voir pour l’édition 2025 !
Lise Benkemoun,
Directrice artistique de Diasporama